La robe Clémence

Dessiner ses propres patrons est une pratique gratifiante, mais cela comporte un inconvénient majeur : quand ça foire, on ne peut s’en prendre qu’à soi-même. Quand il est facile de maudire un(e) créateur(trice) pour un embu impossible à résorber, deux pièces qui ne correspondent pas ou des explications nébuleuses…quand on se trompe sur son propre patronage, et bien on se maudit soi-même. Et c’est encore pire quand on ne comprend pas son erreur !

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Tout est parti de ce coupon, déniché chez Agnès B il y a deux ans. L’époque où je croyais pouvoir couper une robe demi saison dans un coupon d’1m50. Et que les carreaux ne criaient pas « RACCORDS ! » dans mon petit cerveau.

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J’y avais tout de suite vu une robe chemise, sans doute inspirée par cette jolie robe. Deux automnes que j’attendais de valider mon corsage avec pinces pour me lancer…mais avant, il fallait déterminer la composition de ce coupon.

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C’est un peu le souci des ventes Agnès B : vous n’avez pas la moindre idée ce que vous achetez. Les rouleaux sont posés, vous vous servez, et vous allez payer votre dû à la caisse. En déroulant mon tissu je suis tombée sur cette étiquette, qui indiquait une composition 100% soie. Pourtant son aspect était assez raide, bien que fin. Je pensais qu’une soie était forcément glissante, et en potassant j’ai appris qu’une soie peut être tissée de différentes manières, et donc, se présenter sous différents aspects. J’ai alors suivi les conseils de ma prof, même si cela m’a toujours fait peur, vu ma maladresse légendaire : brûler un bout de tissu pour déterminer sa composition.

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(Une fois enfant, j’ai failli cramer la chambre de ma petite soeur en voulant brûler les bords d’une feuille pour en faire un parchemin. ^^)(True story.)

BREF, (ET EN PRENANT TOUTES MES PRECAUTIONS 😀 ), j’ai brûlé un morceau de mon tissu, et m’aidant du super bouquin de Christelle, j’ai remarqué que les cendres formaient comme des bouts de charbon…exactement ce qu’est censée devenir la soie brulée ! Le mystère était donc résolu.

(Et je vous raconte pas la pression, genre, je vais COUDRE DE LA SOIE BORDEL !

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Pour se faire, j’ai repris le patron de la robe Amal. Comme sur la robe Sandrine, j’ai rabaissé le milieu devant de 2cms. J’ai dessiné des manches courtes. J’ai gardé les plis couchés de la jupe. Et je me suis armée de courage pour redessiner tout le col.

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Vous connaissez ma passion des cols chemise : je les aime en deux parties, avec pied de col et tombant. J’ai suivi la méthode préconisé dans un bouquin Esmod, et une toile a validé mon patronage.

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(Croyez-le, sur le moment j’étais pas peu fière !)(J’aurais du en profiter, ça n’allait pas durer. 😀 )

Je coupe alors mon tissu, monte mon corsage, puis ma jupe, et au moment d’assembler la taille, je découvre que les 2 milieux devant de mon corsage sont plus longs d’1cm, au niveau du repli pour le boutonnage. Pas grave, me dis-je, j’ai du manquer de précision au moment de la découpe de mon tissu. Je recoupe donc ces 2cms, termine l’assemblage de ma jupe, procède aux finitions de la robe, et au moment de l’essayage final…patatras, je me sens vraiment engoncée au niveau de la poitrine.

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Vous le voyez sur cette photo, au tissu qui s’étire entre les deux boutons. Ces 2cms, recoupés plus haut parce qu’imaginés en trop, étaient au contraire ultra nécessaires à l’aisance de la robe !

J’ai dû passer des heures sur mon patronage, à le retourner dans tous les sens pour comprendre mon erreur, mais je suis pour l’instant toujours incapable de la pointer. Si vous saviez comme je m’en suis voulue !

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Au bout du rouleau, j’ai appelé ma prof de modélisme, et tout adorable qu’elle est (une perle je vous dis, une perle !), elle a pris le temps de me donner des pistes pour palier au souci d’aisance :

  • ne pas toucher aux pinces : cela ne changerait rien au problème.
  • soit recréer une patte de boutonnage, en y incorporant les 2cms perdus
  • soit créer un pli creux dans le dos, en rajoutant du tissu
  • soit reprendre les coutures côtés, en réduisant mon couturage, qui est d’1,5cm.

Hélas, je n’avais plus de tissu pour refaire quoi que ce soit. Et toute ma robe étant montée en couture anglaise, je n’avais pas le courage de défaire toutes mes emmanchures pour réduire mes coutures côtés.

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(Oui, c’est l’envers de la robe. Dites moi que vous compatissez. ^^ )

Au final, j’ai bien tentée de grappiller quelques millimètres sur les coutures côtés, en réduisant ma seconde couture anglaise, mais cela n’a rien changé à mon problème d’aisance : les boutons tiraient toujours sur le devant de ma robe, et j’avais comme un excès de tissu sous les emmanchures. C’était hyper moche. J’ai donc tout repris à l’original.

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J’arrivais bien à la fermer, mais cet étirement entre le 4ème et le 5ème bouton m’énervait. Et c’est Emilie qui va me donner une astuce : rajouter une pression à coudre entre les 2 boutons pour que cela ne s’ouvre plus !

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Et ça marche ! Alors, certes, je ne gagne pas en confort, mais visuellement, on a moins l’impression que mes boutons vont exploser à la moindre respiration.

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Ce cliché de profil montre à quel point ma poitrine est engoncée dans le corsage. Notez que je l’ai porté ce week-end avec un autre soutien gorge, et j’ai gagné un tout petit peu en confort. (et oui, je profite de ce billet pour devancer tous les commentaires de ce type : JE NE SUIS PAS ENCEINTE SANS LE SAVOIR. 😀 )(Je vous vois venir hein, mais l’épidémie de bébés sur la blogo ne passera pas par moi, j’ai assez donné. 😀 )

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Notez qu’avec toutes ces péripéties, la notion même de raccords ne m’a pas spécialement effleuré l’esprit. 😀 N’ayant qu’1m50 de tissu, j’ai du choisir entre les raccords côtés ou les raccord au niveau de la taille. J’ai bien tenté de réussir au mieux mes raccords côtés, mais comme vous le pouvez sur  cette photo, ça n’a pas fonctionné partout.

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Et comment vous dire…


Voilà. 😀

Les boutons proviennent de chez Mercerie Extra

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…le col est donc un col chemise…

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…et voici ce qu’il donne fermé.

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(Quand j’essaye d’impressionner mes élèves.)(En vrai ça ne marche pas du tout. 😀 )

Verdict : écoutez, si au premier essayage j’étais totalement catastrophée, pour l’avoir porté ce week-end, mon avis est nuancé. Certes, ce n’est pas la robe la plus confortable de mon dressing, mais elle est totalement portable, et avec ce gilet, l’ensemble est adorable !

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Et pour jouer avec les feuilles mortes elle est juste parfaite !

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(Et promis, dès que je comprends l’erreur, je ferai un edit à ce billet !)(Et pourquoi Clémence ? Parce que j’ai cousu cette robe alors qu’une amie chère s’apprêtait à donner la vie à nouveau, que cette amie s’appelle Clémence, qu’elle adore les carreaux et que j’ai découvert les ventes Agnès B en sa compagnie : la robe Clémence, donc. ❤)

EDIT : j’ai écrit cet article sur plusieurs jours, et ça y est, j’ai compris ! L’erreur venait bien de mon patronage : en rabaissant la ligne milieu, je n’ai pas vérifié que le haut de la jupe se calerait parfaitement au bas du corsage, et il manquait 1cm sur le milieu de la jupe devant ! AH, croyez moi, j’étais torturée par ce truc depuis des jours et je me sens enfin libérée ! Pas forcément plus à l’aise dans la robe mais au moins, je vérifierai mieux mes couturages à l’avenir. « Je ne perds jamais : soit je gagne, soit j’apprends », pas vrai ? 😉

Belle semaine les filles, et prenez soin de vous. ❤

39 comments

  1. Téï says:

    Tu es acharnée et ça paie! C’est très réussi franchement moi je ne voyais pas le « bâillement  » entre les boutons. J’aime le ton de ton message, tu positives. On sent bien toutes les étapes par lesquelles tu es passée. Belle robe encore!

  2. Orianne says:

    La couture et le moralisme ne sont pas un long fleuve tranquille . En tout cas ton soucis d’aisance ne gâché rien au visuel de la robe ! J’ai bien rigolé en lisant ton aventure pyromane

    • Le Papillon says:

      Crois moi, mes parents ont moins rigolé à ce moment là. Et le pire, c’est qu’à l’époque une tante à moi dormait dans cette chambre, et comme elle fumait, j’avais tenté de lui faire porter le chapeau. Je suis horrible. 😀 😀 😀

  3. Corinne says:

    bonjour, faire des raccords à toutes les coutures, ce n’est pas si simple et il faut avoir assez de tissu pour positionner tous les morceaux. Je me rappelle des cours de moulages que j’ai eu (il y a plus de 35 ans, maintenant) et le professeur nous avait appris la patience, arrêter puis reprendre le travail plus tard à t^t reposée. J’ai toujours suivi ces conseils. Bon je n’ai pas de mannequin, donc je ne fais plus de moulage. Mais je cherche encore de temps en temps le graal.
    Belle robe et la soie, c’est magique à porter. bravo encore et toujours

  4. Chatkikou says:

    Malgré tous les problèmes que tu as rencontré, elle bien jolie cette robe! et elle te va très bien. Pour le raccord des carreaux, il ne faut pas t’en faire parce que sur ce type de modèle c’est quasiment impossible de le faire.
    Elle est très bien comme ça.

  5. Pascale says:

    Cette robe est bien ajustée. Je trouve qu’elle te va à merveille. J’admire ton opiniâtreté. J’en manque et du coup mes cousettes manquent de précisions. Tes finitions sont toujours aux petits oignons